Le stoïcisme et les rêves (complément d’article)

Cet article est un complément de l’article L’interprétation des rêves et l’expérience onirique dans le stoïcisme.

Citations complémentaires

PLATON

« Mais lorsqu’un homme mène une vie sobre et réglée ; lorsqu’il se livre au sommeil, après avoir éveillé en lui la raison, l’avoir nourrie de nobles pensées, de spéculations élevées, et s’être entretenu avec lui-même ; lorsqu’il a évité d’affamer aussi bien que de rassasier le désir, afin que celui-ci se repose et ne vienne point troubler, de ses joies ou ses tristesses, le principe meilleur, mais qu’il le laisse, seul et dégagé, examiner et poursuivre d’une ardeur curieuse ce qu’il voudrait savoir du passé, du présent et même de l’avenir ; lorsque cet homme a eu soin aussi de maintenir en repos la colère, et qu’il se couche, le cœur tranquille et exempt de ressentiment contre qui que ce soit ; enfin, lorsque ses yeux se ferment, le principe de la sagesse seul en mouvement entre dans le silence des deux autres, en cet état, tu le sais, l’âme entre dans un rapport plus intime avec la vérité, et les visions des songes n’ont rien de criminel » – Platon, La République, IX, 1

DIOGÈNE LAËRCE

« La représentation vient donc d’abord, puis la pensée réfléchie qui énonce ce qu’elle éprouve du fait de la représentation et l’exprime par le discours ; la représentation diffère de l’imagination ; l’imagination est une apparence de pensée, telle qu’elle a lieu dans les rêves, la représentation est une empreinte dans l’âme, c’est-à-dire une altération, comme dit Chrysippe au deuxième livre « De l’âme » ; car il ne faut pas comprendre « empreinte » au sens d’empreinte d’un cachet, puisqu’il est impossible que plusieurs empreintes se produisent de la même manière au même endroit » – Diogène Laërce, Vies et opinions des philosophes, VII, 49-50

CICÉRON

« En outre, la présence des dieux en personne, telle que je l’ai rappelée plus haut, montre qu’ils veillent et sur les villes et sur les individus ; on le comprend encore par les présages de l’avenir qui sont révélés dans l’état de sommeil comme dans l’état de veille » – Cicéron, De la nature des Dieux, II, LXVI, 166

« Mais dès l’origine le monde a été institué de façon qu’à tel événement déterminé tel signe servît de présage annonciateur, qu’il faille le chercher dans les entrailles des victimes, dans le vol ou le cri des oiseaux, dans les fulgurations atmosphériques, dans les prodiges, les astres, les visions du songeur, ou les paroles du délirant. » – Cicéron, de la divination, I, LII (à noter que Sénèque semble s’être inspiré de ce passage dans ses Question naturelles en évoquant la mécanique des rêves divinatoires).

« Ensuite, puisque l’esprit est mû par lui-même, comme le montrent les images peintes dans la pensée et celles qui apparaissent parfois dans le sommeil ou dans la folie, il est vraisemblable que l’esprit est mû non seulement de manière à ne pas distinguer si ces images sont vraies ou fausses, mais de façon qu’il n’y ait aucune différence entre elles ; par exemple si l’on tremble et que l’on pâlisse à la suite d’une vision causée par un mouvement intérieur à l’esprit ou d’une réalité redoutable qui se présente à l’extérieur, sans qu’il y ait rien pour distinguer dans les deux cas le tremblement et la pâleur ni l’image intérieure et l’objet extérieur » – Cicéron, Premiers académiques, II, XIV, 48

« En second lieu, quant aux visions vaines (qu’elles soient formées par la pensée, ce que nous accordons, ou pendant le sommeil ou dans l’ivresse ou dans la folie), il y a un seul moyen de les écarter, c’est de dire que toutes les représentations de ce genre sont privées de cette évidence à laquelle nous devons nous tenir obstinément » – Cicéron, Premiers académiques, II, XVI, 51

« D’abord vous affirmez qu’il est impossible qu’il y ait personne qui ne donne son assentiment à rien. Mais c’est le contraire qui est évident; puisque Panétius, qui, à mon avis, a le premier rang chez les Stoïciens, disait qu’il doutait de ce que tous les Stoïciens, sauf lui, considèrent comme très certain : de la vérité des réponses des haruspices des auspices, des oracles, des songes, des prédictions des devins, et suspendait son assentiment, ce qu’il pouvait faire en des matières que ceux dont il les avait apprises tenaient pour très certaines, pourquoi le sage ne pourrait-il pas le faire à propos du reste ? » – Cicéron, Premiers académiques, II, XXXIII, 107

« Ces faits sont ceux dont tu as parlé avec grand détail : les dormeurs, les ivrognes, les fous ont, disais-tu, des représentations plus faibles que ceux qui sont éveillés, sobres et dans leur bon sens […] Comme si l’on niait que, au réveil, l’on sait que l’on a rêvé, et que, l’accès de folie une fois apaisé, l’on pensait que toutes les visions apparues dans cet accès sont réelles ! » – Cicéron, Premiers académiques, XXVII, 88

SÉNÈQUE

« L’homme légèrement assoupi perçoit des images tandis qu’il repose, et parfois en dormant il se rend compte qu’il dort. Un sommeil profond éteint jusqu’aux rêves ; il absorbe l’âme au point d’abolir en elle la conscience de soi » Sénèque, Lettres à Lucilius, 53, 7

SOGYAL RINPOCHÉ (Bouddhisme)

« L’attitude dans votre esprit et dans l’état de sommeil et de rêve indique la manière dont il se comportera dans les états correspondants du bardo ; la façon dont vous réagissez aujourd’hui aux rêves, aux cauchemars et aux difficultés vous montre, par exemple, comment vous pourriez réagir après votre mort » – Sogyal Rinpoché, Le livre tibétain de la vie et de la mort, sept (Bardos et autres réalités)

Remarques complémentaires

SUR CLAUDE GALIEN

Comme dit dans l’article, le médecin personnel de Marc Aurèle, Claude Galien, était un adorateur du dieu de la guérison Asclépios. Son adoration résulte de deux indications reçues d’Asclépios au cours de deux songes clairs, pour soigner ses douleurs en réalisant un nouveau type de saignée.

D’après Véronique Boudon-Meillon (Galien de Pergame. Un médecin grec à Rome) Claude Galien a ensuite eu recours au rêve lucide dans le cadre de sa pratique médicale.

SUR DION CASSIUS

Dion Cassius, d’influence stoïcienne, a écrit un opuscule sur les songes. L’expérience onirique joue un rôle important dans sa vie. C’est cette dernière qui le dirige vers sa vocation d’historien, lui annonce l’accession au pouvoir de Septime Sévère ou lui donne à voir l’avenir. Plus d’informations ici : http://bcs.fltr.ucl.ac.be/ENCYC-1/Dion_Cassius.htm

LE SYLLOGISME DES STOÏCIENS SUR LA DIVINATION

Sur les rêves prémonitoires/divinatoires, les stoïciens soutiennent le syllogisme suivant, rapporté par Cicéron dans De la divination (XXXVIII) :

Si les dieux existent et ne révèlent pas aux hommes les événements futurs, alors ils n’aiment pas les hommes (A) ou bien ils jugent qu’il ne leur importe en rien de savoir ce qui arrivera (B) ou bien ils considèrent cette révélation comme peu compatible avec leur propre majesté (C) ou bien ils ne disposent pas des moyens de la faire (D).

Or, il n’est pas vrai que les dieux n’aiment pas les hommes (A’), il n’est pas vrai qu’ils ignorent ce qu’ils ont eux-mêmes arrêté, décidé, il n’est pas vrai que la connaissance de l’avenir ne nous importe en rien (B’), il n’est pas vrai qu’ils ne peuvent croire que la révélation soit incompatible avec leur majesté (car ils font preuve de bienfaisance) (C’), il n’est pas vrai qu’ils ne sachent pas ce qui arrivera (D’).

Donc il est impossible qu’il y ait des dieux et qu’il ne nous annoncent pas les événements à venir.

Cicéron s’amuse que lui et les académiciens ne leur accorde aucune des prémisses.

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