Noël : l’art de faire des cadeaux, selon le Stoïcisme (Sénèque)

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Que ce soit à l’occasion d’un anniversaire, de Noël ou d’un événement en particulier, nous sommes tous amenés à offrir un cadeau à quelqu’un, à un moment de notre vie. Dans son traité sur Les bienfaits, Sénèque consacre justement toute une partie à l’art de faire des cadeaux. Et ses conseils sont toujours d’actualité.

Pour les stoïciens, le cadeau est un type de bienfait

Lorsque nous offrons un cadeau, c’est l’intention qui compte, et c’est cela qui en fait un bienfait. Sénèque soutient déjà cette idée à son époque, en cohérence avec la philosophie stoïcienne.

« Qu’est-ce donc qu’un bienfait ? Un acte de bienveillance qui procure de la joie et qui, par ce fait, s’accompagne de joie, en même temps qu’une inclination et une disposition spontanée à l’accomplir. Aussi l’important n’est-il pas l’action accomplie ou la chose donnée, mais l’intention, puisque le bienfait ne consiste pas dans ce qui est fait ou donné, mais dans les sentiments, sans plus, de celui qui donne ou agit. » I, VI, 1.

Dans le Stoïcisme, le bienfait est un bien, la chose donnée est un indifférent. Pourquoi ? Car les stoïciens considèrent que le bonheur dépend uniquement de la bonne disposition de notre esprit. Si l’esprit est mal disposé, aucun cadeau ne pourra le rendre heureux, car le bonheur ne réside pas dans la possession de choses matérielles mais dans un état d’être.

Pourquoi offrir un cadeau alors ? Car même si le cadeau est un indifférent, le bienfait s’exprime grâce au fait d’offrir un cadeau. C’est un moyen pour exprimer de nobles sentiments comme la joie, le souci de l’autre, la bienveillance ou la gentillesse. Ce sont des vertus, qui contribuent à notre bonheur et à celui d’autrui.

Comment offrir un bon cadeau d’après le Stoïcisme ?

Le fait que le cadeau soit un indifférent par rapport à notre bonheur ne signifie pas que la nature du cadeau n’a aucune importance. En réalité, la vertu s’exprime et s’exerce dans les choses que nous choisissons. Le temps, l’énergie et l’attention portées à choisir le cadeau pour qu’il convienne à la personne qui le reçoit est une façon d’exprimer et d’exercer notre propre vertu.

Ainsi, Sénèque recommande de choisir un cadeau :

  • qui fait plaisir (« Cherchons le présent dont l’offre fera le plus de plaisir » — I, XI, 6) ;
  • qui n’est pas banal («Ils ne doivent pas non plus être banals » — I, XI, 5) ;
  • qui tient compte du lieu et du moment (I, XI, 5) ;
  • qui est utile ( « nous nous garderons d’envoyer des cadeaux inutiles » — I, XI, 6) ;
  • qui ne fait pas référence à une infirmité de la personne qui reçoit le cadeau (« L’injure commence et le bienfait cesse lorsqu’on y reconnaît la maladie de celui qui le reçoit. » I, XI, 6) ;
  • qui est susceptible de durer (« de préférence nous rechercherons des objets susceptibles de durer, afin que notre présent soit le moins possible périssable — I, XII, 1).

Les critères proposés par Sénèque sont encore d’actualité : un cadeau plaisant, original, contextuel, utile, bienveillant et durable. Ainsi, Sénèque déconseille d’offrir « des livres à un paysan, ou des filets à un homme d’étude » (I, XI, 6), « du vin à un ivrogne ou des remèdes à un valétudinaire » (I, XI, 6), « des vêtements d’été en hiver, ou d’hiver pendant le solstice d’été » (I, XII, 3). Aujourd’hui, il ajouterait probablement à la liste les cartes cadeaux ou coffrets Wonderbox, souvent trop impersonnels.

La question d’un cadeau durable

Le souci de Sénèque pour choisir des objets durables peut paraître très contemporain. En réalité, il n’est pas motivé par des soucis écologiques. Pour Sénèque, nous ne devons jamais rappeler à quelqu’un un cadeau que nous lui avons fait. Offrir quelque chose de durable est alors un moyen de faire en sorte que la personne qui reçoit le cadeau se souvienne du bienfait et du bienfaiteur :

« Il y a en vérité une raison de plus de chercher des présents durables dans le devoir que nous avons de ne jamais les rappeler : que l’objet lui-même réveille le souvenir prêt à s’évanouir. Plus volontiers je donnerai de l’argenterie que de l’argent ; plus volontiers, des statues que des étoffes et des objets qu’un usage de quelques jours suffit à détériorer. » (I, XII, 1-2)

Bien entendu, dans la pratique du Stoïcisme aujourd’hui, choisir un objet durable, fait de matériaux écologiques, plutôt qu’un gadget périssable, peut être justifié par le souci écologique plutôt que le désir qu’on se souvienne de notre cadeau. Nous pourrions ajouter comme critères le choix d’un objet fabriqué dans le pays où nous résidons, en circuit-court et éventuellement, de façon artisanale. Avec tout cela, votre cadeau sera définitivement un bienfait, c’est-à-dire un acte de vertu, soucieux de la planète, d’autrui et, par conséquent, de vous-même.

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