#9 Pratique du stoïcisme : bien définir le bien et le mal

Cette série d’articles constitue mon retour d’expérience sur le Manuel pour les nouveaux stoïciens (A handbook for new Stoics), un livre de pratique du stoïcisme, par Massimo Pigliucci et Gregory Lopez. Pendant une année, chaque semaine, j’expérimente la pratique stoïcienne proposée par le Manuel et vous partage ici mon bilan hebdomadaire. Vous aurez ainsi un aperçu des différents exercices stoïciens et des bienfaits (ou non) qu’ils peuvent vous offrir. Bienvenue dans la semaine 9 de mon journal de bord !

💬 Une pratique présentée par Sénèque

Donc la vertu est le fondement de la vraie félicité. Que te conseillera cette vertu ? De ne pas regarder comme un bien ou comme un mal ce qui ne sera pas l’effet de ta vertu ou de ta perversité.

Sénèque, De la vie heureuse, XVI, 1

🔥 Comment mettre en application cette pratique ?

Cette semaine, il fallait d’abord identifier les différentes façons de qualifier quelque chose de bien ou de mal : « ce gâteau est horrible », « j’ai un mauvais tempérament », « c’est un super conducteur », « le film était trop cool », etc. Toutes ces façons de dire reviennent à qualifier quelque chose de bon ou de mauvais.

Une fois que l’on prend conscience des jugements de valeur, l’idée est de :

  • reformuler les phrases où les notions de bien et de mal sont mal utilisées (c’est-à-dire dans un angle non-stoïcien) ;
  • continuer à utiliser les notions de bien et de mal lorsqu’on les utilise déjà dans un angle stoïcien.

L’angle stoïcien est le suivant : le bien et le mal sont des notions qui renvoient uniquement à notre caractère. Ainsi, dire « je lui ai mal parlé » utilise la notion « mal » dans un angle stoïcien, car « mal » renvoit à l’une de nos façons d’être et d’agir. Dire, « j’ai un bon tempérament » utilise la notion « bien » dans un angle stoïcien pour les mêmes raisons.

En revanche, dire « ce gâteau est horrible » utilise d’une façon non-stoïcienne la notion de « mal » (contenue dans « horrible ») car « horrible » ne renvoit pas à notre propre caractère mais au gâteau. Or, stricto sensu, un gâteau ne peut pas être horrible. Une manière de reformuler cela de façon stoïcienne serait de dire : « je n’aime vraiment pas ce gâteau ».

Il en va de même pour « il lui a mal parlé ». Ici, on se réfère au caractère d’une autre personne et non pas à notre propre caractère. L’action est mauvaise du point de vue de celui qui la réalise, car elle concerne son propre caractère ; elle est en revanche un indifférent non préférable du point de vue d’un observateur extérieur, car elle ne concerne pas son propre caractère. Une manière de reformuler cela serait de dire : « je n’aime pas la façon dont il lui a parlé », ou d’être plus factuel « il lui a dit ceci, elle a été blessée ».

La pratique consiste alors à rester vigilant à notre manière de penser et de parler, afin de ne pas attribuer les qualificatifs de bien et de mal aux choses extérieures, pour les attribuer uniquement à notre propre caractère.

🔎 Un exemple : le bouton de fièvre n’est pas un mal

Un événement très opportun est survenu le lundi matin : j’ai développé un bouton de fièvre. C’est une chose récurrente chez moi, je suis habitué du fait (je vous épargne les photos). L’originalité est que je développe souvent ce bouton de fièvre au niveau du nez — l’affection, déjà pas très esthétique, se voit donc littéralement comme le nez au milieu de la figure. Et cela a tendance à saper mon moral : ce qui est une conséquence psychologique assez classique de ce virus. Mon discours intérieur dans cette situation varie généralement du : « c’est terrible ce qu’il m’arrive » à « j’ai envie de rien faire, juste de rester chez moi à éviter n’importe quelle autre interaction sociale ».

Dès les premiers symptômes, j’ai donc essayé de maintenir un discours intérieur en cohérence avec l’exercice de la semaine. Je me suis répété, comme un mantra : « cette maladie n’est pas un mal », « le regard d’autrui n’est pas un mal». J’ai complété cela avec d’autres pensées : « mon apparence ne détermine pas mon caractère », « cette maladie a une fin », « c’est l’occasion de travailler mon indépendance à l’égard du regard des autres ». J’ai aussi trouvé l’astuce de vivre autant que possible dans l’instant présent, de m’absorber dans la tâche au travail, de m’oublier dans l’action.

Bien sûr, mon état d’esprit est resté globalement affecté par l’affection cutanée, je n’ai pas fait abstraction complète de mon apparence ou de la gêne que cela occasionnait. Mais j’avais la volonté d’essayer — ce qui est nouveau — et c’est la première fois que j’ai réussi à tenir le cap malgré le tumulte psychologique habituel que provoque l’affection. Je pense que c’est la conséquence du travail réalisé pour ne pas associer cette affection à quelque chose de « mal » ou de « négatif » pour moi. Cela m’a demandé beaucoup d’énergie (sociale, émotionnelle). Je n’en tirerai pas de conclusion sur l’évolution de mon caractère, je reste prudent, mais c’est une petite victoire.

🤔 Mon retour d’expérience sur la semaine #9

Je recommande cette pratique car elle est fondamentale dans le stoïcisme. Observer les choses sans les considérer bonnes ou mauvaises, tout en s’observant soi-même pour voir ce qu’il y a de bon (utile) ou de mauvais (nuisible) dans notre caractère permet de vivre de façon plus apaisée, en cultivant un discours intérieur qui projette moins de choses sur la réalité extérieure et qui développe notre autonomie.

✏️ Extraits de mon journal de pensées

Face à chaque difficulté, il existe un mantra, une image, un symbole, un raisonnement, qui peut nous aider à y faire face.

Ton apparence ne détermine pas ton caractère.

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